Et si la fiction faisait basculer le monde

Si notre monde s’apparente de plus en plus à des fictions de SF apocalyptiques c’est peut-être parce qu’elles étaient visionnaires. C’est peut-être aussi parce que nous avons créé ce que nous avons lu, que nous étions acclimatés, prêts pour la surveillance, la déshumanisation, une Nature abimée, la citoyenneté résignée. Dans les deux cas la création semble accoucher du réel.

Et si de nouvelles fictions pouvaient faire basculer le monde ?

Comment créer un autre monde tant qu’il est impensé ? Tant que nous ne le rêvons pas. Comment défendre des futurs meilleurs si on ne peut les imaginer, si nos cerveaux sont secs, confisqués, squattés par le high-tech et de sombres scénarios ? Comment croire en notre libre arbitre, en notre victoire, tant que nous ne lisons que la soumission aux autorités et à la fatalité ?

Après 20 ans à analyser les freins au changement, à porter des leviers de métamorphose, je suis aujourd’hui convaincue d’une chose : notre inconscient collectif a besoin d’être nourri par des fictions qui déjouent les pires pronostics.

Parce qu’elle libère l’imaginaire et crée du désir, la fiction abreuve d’autres futurs, elle nous délie de la résignation, réouvre le champ de possible, attise ce sentiment implacable que nous avions naturellement enfant: la puissance d’être, nous pouvons être tout, nous pouvons créer ce que nous voulons voir advenir.

Les fictions nous ravivent, nous convoquent. Elles nous rappellent qui nous pourrions être. Qui nous sommes vraiment. Au plus beau du plus profond. Elles ont un doux pouvoir subversif. L’attention librement consentie du lecteur, de la lectrice se laisse surprendre, émouvoir, bousculer, transformer.

Et si l’on décidait par nos fictions de décoloniser nos imaginaires. Et si l’on donnait de l’air à nos prétentions. Et si nous cessions de nourrir nos futurs avec des dystopies, ce dont nous ne voulons pas, pour les rallumer avec des utopies, ce qui n’existe pas encore. Donnons du poids du côté combatif et lumineux.

Sandrine Roudaut

Chronique à retrouver dans le magazine Fémininbio de Septembre 2020, au thème parfait « Créer sa vie »

« Les Déliés » sort le 3 septembre, c’est l’histoire d’un monde qui bascule

Il a été sélectionné par Livres Hebdo parmi les 10 romans imaginaire de la rentrée. Une première « critique »  de ce livre est à lire dans le blog litteraire @ledevorateur. « le roman que je voulais lire depuis plusieurs années » (lien à cliquer sur l’image ci dessous).

     

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