Vide de liens charnels indispensables à la vie, vide de reconnaissance des émotions, vide de rituels essentiels à une civilisation, vide d’intensité, vide de spontanéité, et surtout vide du discernement…
Vide dans lequel s’engouffrent injonctions, infantilisations, dénonciations, accusations, oppositions, privations, confiscations, injustices…
Le tout basé sur un vide, vide de légitimité, de cohérence, de justification, de juste proportion mesures/risque réel, de bon sens, …
La vie s’évide, plus qu’elle n’est menacée….
Jusqu’où va-t-on la laisser s’évider ?
Et nous ? Jusqu’où peut-on faire semblant de ne pas voir ce vide ?
Ce vide entre nous. Et ce vide qui nous sépare de notre intuition, de la tentation de la résistance à ce qui nous heurte.
Me hantent tous ces livres que j’ai lus sur le « délire logique », l’enchainement des obéissances et les « raisons d’état’ , les peurs, le corps social qui se soude, chouette un ennemi commun, un ennemi ça te met dans le bon camps, attention aux ennemis de cet ennemi, que rien ne vienne ébranler l’échafaudage de dogmes/réactions/sécurisations…
et le long combat de la clairvoyance dans toute la mécanique perverse, la mesure, le pas de côté, l’autodéfense face à l’absurde… pas simple.
Et ce que te disent tous ces bouquins, le fait que c’est tellement facile à déconstruire après… la logique du délire.
Ce qu’ils te disent enfin c’est qu’il y en a toujours qui se réveillent, encore faut-il qu’ils s’affirment, s’écoutent et se mettent en lien avec d’autres.
Tout cela c’était ce qui me brûlait comme un présage quand j’écrivais Les Suspendu(e)s,
Zou… travaux pratiques. On y est, suspendu(e)s à nos choix .
Ce n’est jamais facile de sortir d’un délire partagé, mais vu l’ambiance du consensus « apparent »… après tout…
Commençons par contrarier le vide en brisant le silence, l’omerta,
Nous voyons tous ces masques, nous pensons qu’il y a consensus, il n’est qu’apparent. Ces masques portés c’est de l’obéissance pas forcément de l’approbation. Créons des petites désobéissances ordinaires quand cela nous parait absurde, cela ouvre la parole, autorise d’autres. C’est un début.
Quand les politiques se baladent sur les plateaux télé sans masque… ils font leur part, ils m’autorisent…
Sinon jusqu’où irons-nous ?
Réapproprions-nous nos vies avant que le vide ne nous brise… avant qu’il nous sépare.
Sandrine Roudaut
Photo Judith Darmont